Cet article est une traduction d’une publication de Sifu Mizner disponible ici: https://discovertaiji.com/fr/cheng-man-ching*s_217.html
A propos de Cheng Man Ching
Beaucoup d’entre nous ont entendu maintes et maintes fois le célèbre adage de feu le professeur Chen Man Ching : « investir dans la perte ». Qu’est-ce que cela veut dire ?
Qu’est-ce que le professeur voulait dire quand il l’a dit ? Il est difficile de connaître les intentions d’autrui, néanmoins je peux partager mon point de vue personnel sur ce principe et la façon dont je l’ai utilisé comme fil conducteur au fil des ans pour que ma formation progresse bien et de manière cohérente.
Tout d’abord, permettez-moi de donner mon avis sur ce qui n’est pas la bonne façon « d’investir dans la perte », ces erreurs communes de compréhension qui bloquent le progrès des élèves dans le développement des compétences réelles du Taijiquan.
1. Ne pas essayer de gagner en poussant les mains, renoncer à votre enracinement ou à votre centre au profit de l’adversaire ou partenaire d’entraînement. Faire cela encore et encore conditionne l’esprit et le corps à se laisser perdre facilement, on devient un mollasson. Ceci n’est clairement pas une bonne approche de la formation aux arts martiaux, au fil du temps on devient très habile à perdre !
2. Donner votre structure et votre espace trop facilement, en développant un style de pousser des mains qui ne se base que sur ce que je considère comme un « céder » (yielding) incorrect. On voit souvent ce genre de réponse de « ver se tortillant » sous la pression, on se trémousse et on fuit face à la force. Se former à la poussée des mains de cette façon ne donne pas la possibilité de développer Peng Jin de manière correcte. Céder de cette manière forme le corps dans une direction opposée à celle des arts martiaux et donne à l’adversaire un espace précieux et des ouvertures pour attaquer les zones vulnérables. Il n’y a nulle part dans les formes de Taiji de tels mouvements, néanmoins cela est commun en occident dans les milieux des poussées des mains où la possibilité de l’adversaire à frapper les zones vulnérables est complètement ignoré.
D’après mon expérience ce sont les deux malentendus les plus courants du principe « investir dans la perte ». Maintenant que nous savons ce qu’il n’est pas, regardons la manière habile d’appliquer ce principe dans notre formation.
Encore une fois c’est juste mon avis sur ce principe, aucun d’entre nous ne peut vraiment savoir ce que le professeur a voulu dire quand il a dit « d’investir dans la perte ». Je tiens à dire que le vrai sens d’« investir dans la perte » est « investir dans le faire correctement », même au prix de perdre. Cela signifie que lorsque nous nous entraînons à la poussée des mains ou tout exercice avec partenaire, nous nous concentrons exclusivement sur les causes de la compétence plutôt que sur le résultat. Par exemple lors de la pratique Lu (tirer en arrière), il y a un alignement squelettique correct à maintenir, si nous nous effondrons en perdant notre alignement afin de ne pas être poussé, nous avons « gagné » cette rencontre mais nous n’avons pas fait l’exercice correctement.
Chaque fois que nous renforçons cette habitude de gagner un petit jeu ou un exercice au détriment de l’intégrité de l’art, en abandonnant ses principes et ses méthodes, nous renforçons ces mauvaises habitudes. Notre entraînement nous éloigne alors du Taijiquan jour après jour et nous n’atteignons jamais nos objectifs lors de nos entraînements. A l’inverse, chaque fois que nous nous tenons fermement aux principes et aux méthodes, même si nous sommes repoussés, nous construisons corporellement et neurologiquement la bonne réponse, et nous nous rapprochons de jour en jour de la véritable essence du Taijiquan. Le résultat final est que nous ne sommes plus poussés, nous gagnons en utilisant le Taijiquan, tout cela résultant du principe « d’investir dans la perte ».
Traduction originale par Kuma Bushi